- BetsyRédacteur en chefEnchanté !Créez votre 1ère fiche de personnageIl est des nôtres !Vous avez créé votre fiche perso pour rejoindre l'équipage du FracasseMaître du SavoirPubliez 500 messages
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Tobr'a - Histoire de Lorelei
Dim 21 Avr - 19:57
Chapitre 1. Cuir usé et jute teinté.
Du sommet d’un toit, dans l’obscurité de la nuit, une silhouette bondit pour finalement stopper sa course et s’asseoir en posant ses mains sur ses genoux. Il n’y avait rien à l’horizon qu’une étendue de poussière ocre et le silence, parfois interrompu par de légères bourrasques qui griffaient les dunes, au point que la jeune fille les imaginés en train de gémir de douleur. Elle porta son attention sur le soleil qui commençait à poindre puis se mit a cherché du regard un point précis. Il s’agissait d’un bâton planté dans le sol d’un jardin à la limite de la ville, en cette saison d’Ondepluie, et cela, même si à Abah les saisons semblait-être perpétuellement les mêmes. À ce moment précis, elle savait. Dans quelques instant le jour lèchera le sable puis le bois et il sera temps, elle resta figée en tenant fermement ses genoux, suivant la course des rayons du soleil engloutir l’obscurité en illuminant le sable de diamants insaisissables.
Le soleil mordit le bâton et Lorelei ferma les yeux en joignant ses mains contre sa poitrine.
— Une journée de plus Mèv, tu me manques.
Elle prit une profonde inspiration avant de bondir sur ses jambes pour se redresser et descendre du toit avant de se faire prendre, elle longea les rues jusqu’à une boutique de tailleur et se faufila discrètement vers l’arrière-boutique. La fillette referma la porte derrière elle, remarqua par la fenêtre que le soleil n’avait pas encore touché la rue principale et se précipita en sautant sur une paillasse fait de vieux tissus troués qu’elle enroula sur eux-mêmes avant de glisser le tous sous un meuble. Elle attrapa un petit ruban de tissus usé qu’elle noua dans ses cheveux, passa de l’eau sur son visage avant d’empoigner un balai. La porte principale de la boutique s’ouvrit au même moment, faisant tinter une cloche en fer accroché à celle-ci.
— Bonjour Lorelei. Fit sobrement un homme entrant dans la pièce, les bras chargeait de deux rouleaux de tissus et d’un sac de laines en pelotes. La fillette lâcha le balai pour lui venir en aide.
— Monsieur Al’Kohan. Salua-t-elle en retour, le débarrassant de l’un des rouleaux qui semblait bien plus imposant dans ses petits bras frêles, elle le déposa dans l'arrière boutique et attrapa le second, tendu par l'homme pour le ranger à côté avant de sorti un livre à la couverture de cuir épaisse et de poursuivre en parcourant les pages. Dame Ko'Jarsen est passé hier soir juste avant que je ne ferme la porte…
— … Nous étions pourtant fermés Lorelei. Coupa-t-il avant de s'asseoir à un établi sur lequel était posé un morceau de cuir fraîchement préparé.
— … Je le sais… Mais elle a aperçu ma chandelle et elle a insisté…
Il soupira lourdement en posant des lunettes attachées à son cou par un cordon de cuir, Lorelei l'observa faire, il paraissait fatigué. Ses dernières semaines, le travail n'avait cessé d'influer et bien que nouvellement cinquantenaire, son employeur ne lui avait jamais paru aussi plus âgé. Elle poursuivit plus lentement en posant ses mots.
— Elle a payé l'intégralité d'avance.
Il releva ses yeux noirs vers elle, la mine contraignait.
— Que veut-elle ?
— les braies de son fils sont usées, c'est un uniforme de la garde… Il vient d'être affecté. C'est ce qu'elle m'a dit.
— Et la garde ne dispose-t-elle pas d'assez de moyen pour offrir de nouveaux uniformes à leurs jeunes recrues ?
Il posa la question pour lui-même avec humeur en attrapant une aiguille épaisse et un maillet fin, commençant à marquer le cuit. Lorelei ne répondit rien, du haut de ses neufs ans, elle avait appris à mettre les soucis des adultes de côté et savait quand se taire. Ainsi, elle fit glisser un tabouret dans un recoin de la pièce éclairé par la lumière de l'extérieur et une bougie, traîna juste à côté un panier dans lequel les pelotes de laines se battaient entre elles et se mêlaient les unes aux autres, commençant à démêlés le sac de nœud.
Les semaines passaient aussi vite que le vent emportait le sable, Lorelei était lasse de reproduire les mêmes gestes chaque jour, mais son maître était arrivé au lever du jour les bras chargés comme à son habitude de tissus bariolés et le sourire aux lèvres ce qui ne manqua pas de piquer la curiosité de Lorelei. Elle avait beau faire son travail en silence Al'Kohan n'était pas homme à ne rien laisser paraître, quand il était en colère son regard se durcissait et il ponctuait ses phrases par des “P” sonore, quand il était soucieux son front se marquer au point qu'il faisait bien dix années de plus et à chaque fois, elle avait pour mission de lui servir un thé brûlant dès que sa tasse était vide, quand il était triste ses yeux devenaient flaques et le silence marqué les tissus et les drapées des étales, s'était comme ça que Lorelei connaissait maître Al'Kohan, si bien qu'elle ne pouvait s'empêcher de le dévisageait dans une grimace indescriptible quand, ce jour-là, tous sourires, il lui demanda de poser ses mains sur une toile de jute teinté de jaune.
— Bon alors ? Tu comptes rester là à me regarder où tu vas la travailler cette toile ?
— Excusez-moi, Monsieur, vous disiez ? Demanda-t-elle en reprenant vie, réalisant soudain ce qu'il lui demandait.
— 4 mètres Lorelei, coupe-moi 4 mètres, ensuite va dans l'arrière-boutique pour le baigner, vérifie que le jaune ne tourne pas, ensuite, tu passeras un bon coup de balai, il y a du fil partout..
— Vous vous sentez bien Monsieur ?
— Mais qu'est-ce que tu me chantes ? Bien-sûr que je vais bien, tu comptes te mettre au travail ou je trouve quelqu'un d'autre pour me filer un coup de main ?
— Je… Oui, je m'y mets tout de suite !
Elle s’exécuta, découpa minutieusement le précieux tissu, fit bouillir de l’eau en faisant infuser des fleurs de calendula prit le linge pour le tremper avant d’allumer une chandelle, à la moitié de sa consumation, elle devrait sortir le tissu pour le presser et vérifier sa teinte, en attendant, elle ne devrait pas cesser de retourner le jute dans l’eau bouillante. L'exercice était éreintant pour les bras, mais son esprit, lui, était en ébullition, l’humeur de son maître avait piqué sa curiosité.
Après un temps nécessaire au trempage, elle enfila des gants de cuir, remontant jusqu'à ses coudes et bien trop grands pour ses petits bras frêles, pour extraire le précieux tissu d'un jaune éclatant qu'elle suspendit à une corde à linge dans l'arrière-cour ombragée et revint auprès de son maître en se mordant la lèvre supérieure.
— Je peux vous poser une question, Monsieur ?
Al'kohan fit un tour sur son tabouret en retirant les lunettes sur son nez, l'air intrigué, mais à l'écoute, il haussa un sourcil.
— Oui ?
— Vous avez l'air de bonne humeur aujourd'hui… Je… Il est arrivé quelque chose ?
Il cligna des yeux à plusieurs reprises avant de hausser les sourcils, ils étaient bien fournis, si bien que son étonnement était immanquable et obligea Lorelei à se justifier.
— Ce n'est pas que cela me dérange, au contraire, mais… enfin, cela va faire un an que je travaille pour vous, Monsieur et que vous m'avez sortie de ma misère et je… enfin, c'est la première fois que je vous vois réjoui pour quoi que ce soit…
Ses cils bâtèrent à nouveau, aussi vite que les ailes d'un papillon, il marqua une pause pour dévisager la gamine, l'air penaud face à lui avant de s'esclaffer d'un rire tonitruant.
— M'enfin… À ma place, tu serais aussi joyeux ma petite. Je me réjouis, car la tannerie et la boutique du tailleur à l'autre bout de la ville vient d'être reprise ! Fini le travail à n'en plus finir.
— Mais… Et c'est cela qui vous met en joie ?
— Évidemment ! À mon âge, fillette, avoir du travail par-dessus la tête, ce n'est pas bon, je veux juste pouvoir finir mes jours convenablement en travaillant ce qu'il faut, rassure-toi, il y a bien assez de travaux pour eux comme pour nous, avec la garnison, la noblesse, les marchands, les voyageurs…
Lorelei fit la moue en pesant et comprenant les raisons de son maître, il était indéniable qu'il prenait de l'âge, elle le voyait régulièrement souffrir, du dos, de ses mains, de ses jambes et la toux le prenait chaque fin de journée. Elle hocha la tête en lui offrant un petit sourire qui la rajeunit encore plus.
— Je comprends, maître Al'Kohan, en tout cas, je pourrais m'habituer à cette humeur-là ! Conclut-elle en attrapant un balai pour poursuivre ses tâches.
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