L'Ordre des Lys et du Serpent
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Général Patafouin
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Chapitre II Empty Chapitre II

Sam 24 Fév - 16:45
— Votre présence nous honore, Dame Cynriel. Et qui est ce charmant jeune homme ?
— Voici mon fils cadet, Menduil. Du haut de ses seize printemps, il fait son entrée dans le monde aujourd'hui.
— Ce doit être un grand jour pour vous, dans ce cas, jeune homme, ponctua le Sapiarque en face d’eux.
— En effet, Cerum. J’espère me montrer à la hauteur, approuva Menduil, avec déférence.
— Et où se trouve votre aîné ? Je crois savoir que nous sommes nombreux ici à vouloir lui présenter nos félicitations.
— Oh, Elimon est ainsi, vous savez : il aime se faire désirer.
— La ponctualité n’a jamais été son fort, souligna Menduil, avec lassitude.
— Vyn fel, Menduil. Ne médis pas sur ton frère.
— Pardonnez-moi, Mère.


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Cela parut amuser le Sapiarque.


— Ho ho, les rivalités dans les fratries sont choses courantes, ne vous en faites pas. Mais vous savez ce que l’on dit : c’est une occasion supplémentaire de nourrir son individualité.


Menduil hocha la tête aux dires du sage. Après tout, ses nombreuses années étaient un gage de confiance. 
Avec la grâce d'un cygne blanc, sa mère se pencha vers lui, prenant bien garde à ne pas défaire le savant pliage de son écharpe, pour lui indiquer, à voix basse.


— Vas donc chercher ton père, veux-tu ? Il doit certainement avoir rejoint ses chers amis de l'académie. Je dois aller saluer les représentants de la famille royale et leur présenter mes respects.
— Ne puis-je point venir avec vous, Mère ?
— Tu auras bien des occasions de te distinguer, Menduil, mais aujourd’hui, il est important que tu prennes tes marques. N'oublie surtout pas l'étiquette. C'est le plus important si tu veux faire bonne impression.
— Je n'y manquerai pas, Mère.

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Menduil louvoya entre les différents convives de l'immense salle de réception de l'ambassade, saluant au passage les éminentes personnalités qu'il reconnaissait, ainsi que d'autres jeunes gens de son âge. Comme chaque année des fonds étaient soulevés par les grandes familles du Couchant, afin de favoriser l'éducation de la population. Mais ce moment était également l'occasion de décerner des prix aux jeunes talents les plus prometteurs, leur garantissant une voie royale afin d'accéder aux institutions les plus prestigieuses responsables de former les futurs grands politiciens, savants, artistes et combattants de leur royaume prospère. Bien sûr, Menduil était encore trop jeune pour espérer recevoir un tel honneur, mais son frère avait attiré l'attention du jury avec une facilité déconcertante. Nullement impressionnés, car il s'agissait là d'une gratification que chaque membre de la famille s'était vu attribuer auparavant, il avait semblé évident à leurs parents que leur fils aîné fût primé cette saison. Il n'existait de toute façon aucun autre parcours possible à leurs yeux. 

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Remarquant de loin le riche manteau bleu nuit brodé de fil d'or de son père, il s'approcha du petit groupe qui s'était rassemblé autour de lui pour l'écouter parler. Hilnore avait toujours eu cette prédisposition d'orateur, il contait les histoires comme nul autre et savait fasciner son entourage. Tout le monde s’accordait pour dire de cet elfe, que, s'il n'était point doté du physique le plus exceptionnel, il avait malgré tout un charme magnétique conféré par sa grande assurance. 


— Et c'est alors que je lui ai dit : “enfin, mon bon Eliwen, nous ne pourrons jamais inverser la confluence des forces à ce rythme !”


Rires dans l'assemblée. Menduil s'approcha un peu plus pour être sûr d'être remarqué. Le voyant arriver, son père tendit le bras pour l'introduire au groupe.


— Ah, tu es là ! Laissez-moi vous présenter mon plus jeune fils, Menduil. Menduil, je te présente, de gauche à droite : Runil de Russafeld, éminent botaniste de sa région…
— Oh, c'est trop d'honneur, Hilnore…
— … Tandermil, docteur en astronomie à l'académie de l'Illumination. Linwë gal'Namaria, une des plus grandes donatrices d'art du siècle, et enfin, l'illustre Sapiarque Larnatillë de Lillandril.


La femme aux longs cheveux d'un blanc de soie inclina à son tour la tête. Son cou était orné des parures les plus ostentatoires qu'il eut jamais été donné de voir à Menduil.


— C'est un honneur de faire votre connaissance, Menduil, déclara-t-elle. Vous avez une fort belle famille, Hilnore. Votre fils aspire-t-il lui aussi à un parcours arcanique ?
— Oh non, Menduil est plus un jeune homme d'Histoire et de duels ! Il s'entraîne depuis son plus jeune âge au maniement de l'épée et du fleuret et ses techniques ne sont pas dépourvues d’élégance. Il semble aussi avoir un talent spécial pour retenir les dates des événements les plus lointains. J'ignore comment il fait !


La Sapiarque adressa à Menduil un bref regard courtois avant de revenir à son père. 

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— Il est bien aisé que vos fils se distinguent tant de par leurs aptitudes, même si, venant de votre famille, je m'attendais à ce que vos deux enfants manient la magie avec la même aisance. Heureusement, il faut de tout pour équilibrer notre belle nation. Des hommes et des femmes d'Histoire et d'autres… d'avenir, conclut-elle, déposant une main sur le bras d'Hilnore, tenant un verre de champagne de l'autre, pressant légèrement sa hanche vers lui.


Menduil mit un moment à saisir que la remarque de la Sapiarque n'avait pour seul objectif que de le dévaloriser, bien que cela fut fait avec beaucoup d’élégance et de détours, une façon de parler assez courante, dans cet univers d'érudits se battant pour le prix fictif du meilleur trait d'esprit. Mais ce qu'il savait, c'est qu'il n'aimait en rien la façon qu'elle avait de se comporter avec son père. Ignorait-elle qu'il était marié ? Il décida de partir à l'offensive.


— Êtes-vous mariée, Sapiarque Larnatillë ?
— Quelle question bien directe ! Oui, mon mari doit être dans les coursives adjacentes, certainement à parler de Lettres anciennes avec la première personne qui sera assez désespérée pour s'y intéresser…, lança-t-elle dans un rire entendu, provoquant l'amusement du petit groupe.
— Votre époux doit sûrement avoir l'esprit très ouvert pour tolérer une telle proximité avec d'autres hommes, Madame. Cependant, je doute que cela soit du goût de ma mère.


L'expression avenante de Larnatillë fondit aussitôt pour ne laisser un visage animé que d'un mépris froid. Elle esquissa un sourire à glacer le dos des plus braves. Menduil soutint son regard, sans ciller. Son père semblait vouloir disparaître.


— Mais enfin, qu'est-ce qui te prend, mon garçon ?! Pardonnez-le, Larnatillë, c'est un âge difficile, vous savez… Les enfants cherchent leurs limites…
— Non, voyons, ce n'est rien Hilnore, n'ayez crainte. De toute évidence, ce jeune homme est très protecteur. Il fait ses premiers pas parmi nous, il doit encore apprendre à discerner les nuances pour pouvoir faire preuve de subtilité…


Son père se confondit en excuses et remercia copieusement la Sapiarque pour sa compréhension, non sans adresser quelques regards courroucés à son fils qui se contenta de se tenir droit comme une pique. Sans qu'il sache comment, Hilnore parvint à disperser le groupe pour le mener ensuite à l'écart, le prenant par les épaules.


— Menduil, que t’arrive-t-il, enfin ? Toi qui es toujours si discipliné, quelle idée d'aller t'en prendre à une personne aussi éminente qu'elle ? Surtout en un jour pareil ! Tu n'imagines pas l'influence qu'elle a ! Et elle projette de devenir Haute-Sapiarque, tu ne voudrais pas qu'elle ait une mauvaise opinion de toi…
— Je suis désolé, Père. Mais je l'ai trouvée irrespectueuse. Arrive-t-il vraiment un moment où l'on devient si puissant que l'on peut se passer de décence ?
— Oh, mais ce qu’il s’est passé n'était qu’une bagatelle ! Écoute, tu ne peux pas réagir comme cela lorsque tu es en société. Il va falloir que tu apprennes à tempérer ton propos, compris ? Ce genre d'événements doit servir à te forger une réputation.


Il allait approuver, quand un grand bruit sifflant résonna dans le hall, en contrebas, provoquant un attroupement d'invités intrigués. Menduil et son père se penchèrent par-dessus la balustrade pour apercevoir un splendide et gigantesque griffon doré effectuant des cercles en battant des ailes, au-dessus des convives émerveillés. Au centre de la pièce, un jeune homme portant une tunique d'or et de carmin leva les bras, triomphant.


— Le symbole de notre famille ! 


Toutes les personnes environnantes applaudirent lorsque le griffon monta vers l'immense lustre de cristal pour exploser dans un nuage de poussière scintillante, s'évaporant à mesure que l'illusion se dissipait. Elimon s’inclina, dans une parodie d'humilité.


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— Quel m'as-tu-vu… maugréa Menduil, détournant le regard.
— C'était une impressionnante démonstration de magie d'illusion, Menduil. C'est une habitude très peu élégante de dénigrer ton frère. Sa lumière brille sur nous tous lorsqu’il déploie ses talents. 


Menduil ne répondit rien. Il se contenta d’observer son frère, qui, fier comme un paon, gravissait les marches pour les rejoindre.


— Père, mon cher frère ! Ravi que vous ayez pu assister à ma petite démonstration.
— Tu as fini par trouver l’entrée de la salle, Elimon. Visiblement, les sorts d’illusion sont plus faciles à faire que de se présenter à l’heure.
— C’était très beau, interrompit Hilnore, posant une main sur l’épaule de son fils aîné. Et si nous nous rapprochions de la grande scène ? Il me semble qu’ils ne vont pas tarder à décerner les prix.


La cérémonie parut infiniment longue à Menduil, même s’il devait bien admettre que le discours d’ouverture de la vice-reine sur la fierté de leur grande nation l’avait empli d’un sentiment grisant de patriotisme. Il avait beau regarder le monde depuis le prisme des privilégiés, celui-ci paraissait avoir du sens à ses yeux et de voir la diligence qui était employée pour donner une place à chaque chose était infiniment rassurant. L’on était bien loin des peuples humains primitifs défendant des systèmes archaïques et se perdant dans des conflits sans fin. Ici, tout était ordre et prospérité. Et lorsque la vice-reine invita chacun à faire sa part pour maintenir l’ordre et élever la nation, Menduil sentit qu’il était de son devoir de suivre cette demande. Il le savait : il avait l’œil pour voir ce qui sortait du cadre et s’enorgueillissait de remarquer l’hypocrisie et le mensonge dès lors qu’il s’y trouvait confronté. Il n’y avait que trop été habitué avec Elimon. Bien sûr, son frère présenta une façade de dignité et de profonde humilité lorsqu’on lui décerna son prix de “Promesse de la Magie”, le jury ayant peiné à faire un choix parmi ses nombreuses aptitudes. Il redescendit de la grande scène, accueilli par ses nombreux amis et la fête se poursuivit, un grand buffet ayant été dressé pour l’occasion et des musiciens jouant pour initier les danses. Si Menduil avait eu quelques discussions plaisantes, il était irrité que chacune d’elle commence immanquablement par son frère. S’accordant une pause, il navigua en direction des buffets pour goûter le vin de prune dont tout le monde faisait l’apologie quand une scène attira son attention, à l’écart de la fête. 


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— Ça suffit Elimon, j’en ai assez de t’écouter, tu ne peux pas traiter tout le monde de la sorte ! Je ne suis pas à ta botte ! C’est fini, ne m’approche plus !


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À ces mots, Carilian, le vieil ami de son frère, le repoussa de ses deux mains avant de trancher la foule pour se diriger vers les grandes fenêtres menant au balcon, sous l’ahurissement général. De tels éclats étaient rares dans la bonne société altmeri. Menduil dévisagea son frère un long moment, désemparé. Celui-ci lui adressa un regard acéré et il quitta la pièce, honteux. Jamais Menduil n’aurait cru qu’une telle chose fut possible. Carilian et Elimon se connaissaient depuis qu’ils étaient enfants et il avait toujours pensé que le jeune mage vouait une admiration démesurée pour son frère, bien qu’il n’eût jamais participé aux quolibets qu’il lui lançait. Finalement, il le guetta du regard pour voir où il se trouvait. Il était tenté de le suivre, ne serait-ce que pour apprendre ce qui avait pu déclencher une telle réaction. Après tout, l’ennemi de son frère était son ami. Cela ferait au moins une personne qui ne l’abreuverait pas de discours narrant combien Elimon était formidable. Il céda à sa curiosité et se dirigea vers le balcon. Se tenant à la balustrade, la tête baissée et les épaules voûtées, l’elfe soupira profondément. Menduil crut bon de s’annoncer.


— Carilian… Est-ce que tout va bien ?


Celui-ci hocha lentement la tête, sans se retourner.


— Oui… oui, ça va, merci… 


Il bascula finalement la tête vers lui, tournant ses yeux d’un bleu limpide vers les siens. Il était de toute évidence bouleversé.


— Non, en fait. Ça ne va pas. À quoi bon mentir ? Tout le monde nous a vus.
— C’est presque une certitude, oui…
— Bon sang… Quelle journée épouvantable.
— Tu as pourtant reçu un bel honneur tout à l’heure…
— Ça me fait une belle jambe, tiens ! Tout ça pour que… pour qu’Elimon agisse comme ça avec moi…
— Qu’est-ce qu’il t’a fait ?, demanda Menduil, plissant les yeux, tâchant de contenir sa curiosité.
— Rien, rien… Enfin… Il se comporte comme il l’a toujours fait. Comme… Comme…
— Comme un enfant trop gâté à qui tout réussit et qui croit que le monde doit être à ses pieds ?


Carilian se retourna complètement, toisant Menduil avec ce qu’il crut identifier comme de la reconnaissance.


— … C’est cela. Je suis fatigué de cela. De lui et de sa façon d’agir. C’est terminé, je ne lui adresserai plus la parole.
— Est-ce que je peux te demander pourquoi tu es resté ami avec lui durant tout ce temps ? J’ai l’impression qu’il est comme cela depuis toujours.
— Eh bien… Il m’a appris beaucoup de choses sur la magie. Et vice versa. Lui et moi, on s’entraidait. Et puis, tu sais, je ne suis pas issu d’une aussi noble famille que la tienne. J’ai peut-être des talents magiques, mais je n’ai certainement pas la fortune. La plupart de tes pairs m’ont traité comme un moins que rien juste pour ça. Mais pas Elimon. Il a vu mon talent et il m’a pris sous son aile, sans me poser de questions. 
— Alors que s’est-il passé ?
— Il…, Carilian bascula son regard de côté. Je crois que tout ceci lui est quelque peu monté à la tête ces derniers temps. Il a commencé à me traiter différemment. Mais aujourd’hui, avec sa remise de prix, c’était un autre homme. Finalement, peut-être que pour lui aussi, je suis un moins que rien…
— J’espère au moins que tu ne le laisses pas te convaincre de cela. Lui accorder un tel poids, c’est le laisser gagner.
— Tu ne le penses pas, toi ?
— Non. Je pense simplement que tu as de mauvaises fréquentations. Mais quoi de plus normal pour un mage.


Carilian esquissa un début de sourire.


— Tu crois vraiment que tous les mages sont pareils ?
— Ils ont des ressemblances, oui. Tous les mages que j’ai rencontrés jusqu’à présent m’insupportent. Ils prennent des détours pour parler, font preuve de suffisance, mentent et s’arrangent avec la vérité…
— Tous les mages ne sont pas Elimon, tu sais ? En tout cas, je me ferai un plaisir de te le prouver.
— J’accepte, concéda Menduil qui ne refusait pas ce qui ressemblait à une proposition sincère de démarrer une relation cordiale. Veux-tu un verre ?
— Par Syrabane, si tu ne l’avais pas proposé, je l’aurais fait moi-même !


Au fil de la célébration, Carilian se révéla être d'une bien meilleure compagnie que ce que Menduil avait supposé. Si le jeune homme était d'un naturel calme et peu expansif, il avait les pieds sur terre, loin de la fantaisie démesurée de son frère. Passionné depuis toujours par la magie d'altération, il expliqua à Menduil comment celle-ci pouvait faciliter la vie de quantité de personnes en changeant la nature même de ce qui est, de comment rendre l'objet le plus lourd plus léger que l'air ou de permettre à l'eau d'être respirable et il lui apprit des anecdotes fascinantes sur l'histoire de la magie. Passionné, véritable puit de savoir, surtout pour son jeune âge, Menduil ne fut pas long à comprendre pourquoi son frère en avait fait un parfait bras-droit. Il se dégageait de lui une véritable douceur d'âme, s'abstenant d'émettre un jugement trop hâtif, sans pour autant perdre de sa perspicacité. Malgré tout, il avait des valeurs que Menduil jugea nobles, considérant que même le plus modeste prolétaire avait le droit de s'élever dans la société pour peut qu'il travaille avec acharnement et dignité et il abondait dans son sens lorsqu'il lui partageait l'admiration et le dévouement qu'il vouait à leur royaume et à leurs belles traditions.


Même après qu’ils eurent quitté la cérémonie, Carilian proposa à Menduil de se retrouver, pour que le mage l'aide à mieux comprendre les arcanes, et Menduil se surprit à véritablement apprécier sa présence et ses conseils éclairés. Chaque nouvelle célébration devint pour eux l'occasion de se retrouver, Menduil partageant ses propres anecdotes sur l'histoire de leur peuple à cet ami qui savait écouter et ils échangeaient d'innombrables parties d'échecs, Carilian se révélant être un adversaire de choix. 


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— Tu vois, concernant ta magie…, commença Carilian, un jour où ils s'étaient retrouvés près de la crique où Menduil avait pris l'habitude de s'entraîner, loin de la présence envahissante de son frère. Concernant ta magie, je ne pense pas que tu sois particulièrement mauvais.
— Tu es bien gentil, mais je sais ce que je vaux sur ce point. Je me suis fait une raison, tu sais.
— Non, non, écoute-moi, s'il te plaît, insista Carilian qui savait que c'était là un sujet sensible. Je suis convaincu que tu n'es pas pire qu'un autre dans ce domaine. Quand on y réfléchit, nous avons tous plus ou moins des prédispositions, mais tu n'es pas dénué de magie… Pour moi, tu es simplement… bloqué.
— Bloqué ?, répéta Menduil dans un haussement de sourcils incrédule.
— Oui. Je pense que ta vision de la magie bloque son exercice. Elle n'est pas qu'un outil qui doit suivre la moindre de tes demandes, c'est…


Carilian frotta pensivement le sable sur ses vêtements, cherchant une posture plus confortable contre le rocher sur lequel ils étaient assis.


— C'est une matière vivante qui te traverse et que tu dois t’approprier, sans l'effrayer, avec délicatesse. La plupart des personnes qui, en dépit de leurs prédispositions pour la magie, rencontrent des difficultés, sont celles qui en ont peur ou qui sont trop brutales, celles qui veulent trop en faire d'un coup ou, au contraire, sont trop timides. Voilà pourquoi nous l'apprenons très jeunes, d’ailleurs. Quand nous sommes enfants, nous avons moins de préjugés, nous sommes plus enclins à laisser parler notre intuition. Mais te concernant… Je me dis que beaucoup de paramètres ont pu bloquer ton apprentissage.
— Comme quoi ?, demanda aussitôt Menduil, serrant la mâchoire en fixant l'océan que le soleil, terminant sa course derrière les flots, nimbait de teintes ambrées.


Carilian ne se découragea pas, poursuivant du même ton calme.


— Eh bien, tu es dans l'ombre de ton frère depuis toujours quand on y pense… Tes parents ont de hautes attentes à ce sujet, je suppose et… Tu as une approche très directe des choses.
— N'est-ce pas une bonne chose, selon toi ?, rétorqua-t-il en se refermant un peu plus.
— Si, bien sûr. Pour de nombreux domaines d'ailleurs. Mais la magie nécessite une autre approche. Regarde…


Il ouvrit la paume pour tenter de faire apparaître une flamme, mais seule une petite flammèche poussive apparut.


— Brutalement… 


D'une façon imperceptible, les muscles de ses doigts se décrispèrent et la flamme prit de l'ampleur pour crépiter doucement, produisant même de la chaleur.


— … Et doucement. Tu vois ? Juste une question d'approche. Essaie, tu verras.
— Avec tout le respect que je te dois, Carilian, je préfère m'abstenir, le rembarra Menduil d'un ton sans appel en se remettant sur ses jambes.


Carilian l’imita.


— Quoi ? Mais… Pourquoi ?
— Ce n'est pas pour moi d'accord ? Toutes tes théories sont très distrayantes, quoique tout à fait fantaisistes, mais il n'y a aucun problème avec mon approche. À présent, j'aimerais que l'on cesse d'en parler.


Le jeune mage dévisagea les yeux d'ambre qui le toisaient froidement avant de lâcher un profond soupir, secouant la tête de droite à gauche, de dépit.


— Bien… À ta convenance.


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Menduil, quant à lui, préféra s'éclipser, longeant la plage pour gagner le petit escalier de pierre remontant jusqu'aux rues et ruelles plus fréquentées. Toutefois, les jours qui suivirent, il repensa souvent à cette discussion et il finit par admettre que cela valait peut-être le coup d'essayer de changer son approche de la magie, quand bien même il restait convaincu que son frère le surpasserait toujours.


Alors, un matin, il sella son cheval et descendit les rues jusqu'au domaine familial de Carilian, aux abords de la ville. Excentrée des hauteurs huppées, le manoir n'en restait pas moins une belle propriété Altmer, bien que celle-ci manquât d'entretien, faute de moyens. Il franchit le grand portail de pierre et fit passer sa monture au petit trot, le garçon d'écurie qui le reconnut s’avançant vers lui pour attraper la bride de son cheval.


Chapitre II 16723610

— Bonjour Ceruval ! Venez-vous voir Carilian ?
— En effet. Est-il ici ?
— Il se dirigeait vers l'atelier, si mes souvenirs sont bons. C'est là qu'il se trouve à cette heure-ci, en général.
— Fort bien, résolut Menduil, sautant au bas de sa monture. Je ne dérange pas au moins ?
— Il n'a rien mentionné de tel, Ceruval.


Il hocha la tête, orientant alors ses pas vers l'atelier. Il s'agissait d'une petite remise excentrée du reste de la bâtisse, que Carilian avait investie pour mener quelques expériences, y entassant tout un bric-à-brac d'objets magiques fabriqués à partir de pièces chinées çà et là. La plupart de ses expériences demeuraient à l'état de projet, passant d'un sujet à l'autre sans jamais le compléter, mais ses parents ne semblaient guère y voir là une quelconque source de préoccupation, ce que Menduil trouvait tout à fait surprenant, voire peut-être quelque peu laxiste. Alors qu'il s'approchait du bâtiment aux portes entrouvertes, la voix de Carilian vint le cueillir dans sa progression.


— Arrête… Ce n’est pas un idiot, loin de là, il est juste… borné et ses préjugés le limitent beaucoup. Mais je n'ai pas passé de si mauvais moments en sa compagnie. Il a des idées intéressantes…
— Oui, elles étaient intéressantes deux cents ans plus tôt ! Je rêve ou tu apprécies vraiment mon frère ?


Il stoppa sa marche pour s'aplatir contre la paroi de pierre du bâtiment. Il devait avoir mal entendu. 


— Non ! … Un peu, c'est vrai. Il n'est pas aussi terrible que tu le dépeins non plus. Nous n'avons absolument rien en commun, mais… Il est très loyal et très protecteur.
— Oui, les chiens le sont aussi, tu sais. As-tu essayé de lui lancer la balle, pour voir ? Fait-il des tours ?
— Elimon, je t'en prie, ne sois pas mauvais, ça ne te va pas du tout. 
— D'accord, d'accord, je serai sage. 
— Et puis, j'en ai assez de faire ça… Je ne me reconnais plus. Non seulement, je lui mens, mais j'ai l'impression de me mentir à moi-même…
— Ça va, tu n'es pas obligé de continuer. J'en sais assez, quoi qu'il en soit. Tu as parfaitement rempli ton rôle.
— De toute façon, vu comme il est parti la dernière fois, je doute qu'il souhaite me parler à nouveau… Il m'a lancé un de ces regards…
— Shh… Ne pense plus à l'austère, au froid Menduil. Il n'aime rien ni personne mieux que sa chère épée et ses rêves d'ordre et de droiture. Moi en revanche…
— Promets-moi que tu ne me demanderas plus une chose pareille… C'était si dur de faire semblant de t'en vouloir aussi longtemps.
— Je te le promets solennellement, Carilian de la famille Fenwël. À présent, par pitié, embrasse-moi.


Bouillonnant, serrant les poings, Menduil décida de mettre fin à cet échange romantique pour faire irruption dans l'atelier, sous le regard estomaqué des deux amants qui interrompirent leur langoureux baiser pour le dévisager. Avant même qu'Elimon eut put esquisser le moindre mot, ce fut Menduil qui parla le premier.


— Espèce de petite raclure… Taorc'h Vilt.
— Menduil…, balbutia Carilian en se détachant d'Elimon, le col de sa chemise délacée laissant apparaître son torse.
— Oh, toi, ne dis pas un mot de plus. Hypocrite, menteur, opportuniste… Finalement tu es bien comme tous ceux de ton espèce. Il t'a sûrement promis monts et merveilles et tu l'as suivi, sans réfléchir.


Carilian commença à esquisser quelques mots, mais abandonna, incapable de démentir les accusations dont il se voyait affublé. Elimon prit le relais, redressant fièrement le buste.


— Laisse-le dire. Quoi qu'il en soit, il est bien incapable de saisir la moitié de nos motivations.
— Je ne maîtrise peut-être pas la magie comme vous, mais je ne suis pas idiot, Elimon. De surcroît, je n'ai pas besoin de comprendre vos motivations pour savoir que vous êtes des traîtres, des lâches, des manipulateurs des bas-fonds. Votre place est aux côtés des coupe-jarrets.
— Et que vas-tu faire ? Nous dénoncer à la garde ? En parler à Père ? Ou peut-être à Mère ?


Menduil le toisa d'un air mauvais durant de longues secondes, avant de porter la main à la dague attachée à son ceinturon. Elimon esquissa un sourire.


— Si j'étais toi, je ne ferais pas ça, mon frère… As-tu déjà oublié nos nombreux combats ? Combien de fois m'as-tu vaincu, déjà ?
— Je me suis entraîné depuis la dernière fois.
— Oh, je le sais bien. Tu parles de ces parades minables que tu as reproduites ? Ou peut-être de ces trois sortilèges que tu as péniblement appris à envoyer sans ouvrir la bouche ? Laisse tomber, Men. Tout ceci est peine perdue.


La lame à demi sortie de son fourreau, Menduil ne quittait plus les deux mages du regard. Il tira finalement sa dague d'un geste vif, avant de la diriger vers eux, le bras tendu.

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— Aujourd'hui ou demain, vous devrez payer le prix de vos exactions. Mais te concernant mon frère, je m'en chargerai personnellement. Sois-en assuré.


À ces mots, il rengaina sa dague et fit volte-face pour quitter les lieux. Ni Elimon, ni Carilian ne l’admirent, mais le regard de Menduil avait suffit à les glacer au plus profond d'eux-mêmes.

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